Zabou the terrible

Aller au contenu | Aller au menu | Aller à la recherche

Mot-clé - Vu lu entendu

Fil des billets - Fil des commentaires

samedi, mars 9 2013

Au cœur des limbes


 

Qui dit vacances dit attraper l’un ou l’autre de ma très haute pile, certes à moitié effondrée donc plus large que haute, de « livres pas encore lus » et me plonger dedans.

 

C’est ainsi que j’ai goûté Une saison dans les limbes de Robert Scholtus : petit livre troublant en ce qu’il parle de ces zones frontières, de ces zones floues, qui semblent bien souvent régner en notre vie quotidienne.

 

Comme souvent avec lui, on a l’impression qu’il part en un sens – ici, la si facile et non moins fréquente dénonciation de la modernité – pour s’apercevoir qu’il en extrait finalement des paradoxes, qu’il cherche à montrer la complexité d’un sujet insaisissable qui est celui de notre vie…

 

Cela en fait un livre tout particulier, ardu et poétique à la fois, éveilleur de réflexions, de pensées, de méditations. Comme un appel à la vie, à nous ramener plus à notre condition de vivant, à nous sortir de notre éventuel contentement « limbal » qui nous guette chaque jour.

 

Car, au cœur de ce livre, on trouve cette page, qui s’inscrit comme une bonne bourrasque de vent reçue sur le visage, en ce qu’elle a d’instantané, de fort et de vivifiant :

 

« La vie, vivace et folle, qui s’improvise comme un air de jazz, la vie sautillante et inattendue, la vie au risque de la blessure, au prix de l’abandon, la vie ouverte à l’inconnu, offerte à la rencontre, la vie embarquée en haute mer, affrontée à tous les dangers, promise au déroutement et à l’extravagance de l’amour, voilà ce qu’ils redoutent. »

 

in R. Scholtus, Une saison dans les limbes, éd. Bayard, p. 81

 

mardi, juillet 31 2012

D’une plume (d’oiseau), une nouvelle épître à Diognète ?

 

Les vacances sont propices aux lectures différentes. Et l’esprit rêveur a tendance à constituer des liens étranges avec des lectures déjà connues et la pensée comme l’âme en font alors leur miel : je n’ai pu m’empêcher de trouver, à peine grimé dans ce texte de Chamoiseau, le peuple de Dieu dans la légèreté d’un colibri. La faute à l’épître à Diognète, sans doute.

 

Oui je sais, ce n est pas un colibri mais une cigogne : c est presque pareil, non ;-) 

 

« Ces inconsistances dépensaient l’énergie d’un volcan pour une existence qui ne changeait rien à l’ordre du monde et qui se maintenait ainsi : totalement dérisoire, tout à fait inutile, et dans une intensité vaine…

 

Un autre phénomène me sidérait : elles étaient faites de scintillements. Ce qui couvrait leur corps microscopique était une complexité de structures qui captaient les luminosités pour les diffracter dans les des irisations. Ce sortilège transformait leur dérisoire volume en … Hinnk…. Une splendeur absurde qui parcourait en mille instantanés tout le spectre concevable de l’ombre et de la lumière. […]

 

Son intensité et sa fréquence étaient insolites mais, plus que tout, c’était sa manière d’être toujours à contretemps qui aiguisait mon attention. Son vol disséminait une onde, claudicante mais vibratile à l’infini au cœur de tout ce qui existait. Et, par ce vibratile, tout ce qui existait au fond de mon esprit s’éveillait, se troublait, commençait à changer… »

 

in Patrick Chamoiseau, Les Neuf Consciences du Malfini

 

mercredi, juillet 4 2012

De justificatione catholicum blogum

A force d'avoir des amis qui me font lire des trucs improbables, on en arrive curieusement, comme si tous les chemins y menaient, à la théologie. Enfin... 

Imaginer Jésus et Bouddha en vacances ensemble sur terre, le tout dans un manga, y a pas à dire, fallait oser le faire... 

Forcément, être eux, ça leur pose quelques problèmes : impossible de jouer à des jeux "de destin", impossible pour Jésus de se baigner sans marcher sur l'eau ou, pire, sans la changer en vin ! 

Manga au ton léger, bien souvent désinvolte, parfois caricatural, je ne le conseillerais vraiment pas à tout le monde : il n'est pas indispensable. 

 

MAIS CE MANGA EST ESSENTIEL POUR UNE CHOSE : il contient LA raison ultime de l'existence des blogues cathos. 

Il en aurait tenu un selon ce manga ! 

Bref... vivent les cathogeeks, non ? ;-) 


Pour aller (vachement) plus loin (ou pas) : 

Les Vacances de Jésus et Bouddha (t. 1 et 2) par Hikaru Nakamura

vendredi, septembre 16 2011

Lectures d’été : « La vie devant soi » ou la braise incandescente de l’amour

 Aujourd’hui, j’hésite mais je voudrais vous parler d’un livre un peu particulier… d’une histoire de fils… Bon, disons-le tout net : moi aujourd’hui, je voudrais vous parler d’une histoire de vrais fils de putes.

 

En fait, sous cette accroche choquante[1] je voudrais surtout vous parler d’un livre qui narre une magnifique histoire d’amour. Ce livre, ce n’est pas une sortie récente mais celui qui obtint le Goncourt 1975 : La Vie devant soi d’Emile Ajar – Romain Gary, que je n’avais jamais ouvert.

 

C’est l’histoire tragique de pauvres mômes nés suite à une passade de leurs mères prostituées, et mis en pension chez Madame Rosa, elle-même une ancienne bien connue du métier, trop vieille pour « se défendre avec son cul »[2]. Rien de bien joyeux a priori, une vie à la limite de la clandestinité, dans un milieu fangeux et méprisé.

 

Pourtant, à lire cette histoire, qui est surtout celle du héros, Mohammed, on se prend à sourire. Sourire des réflexions de gosse, pas si bêtes, pleines de finesse et si bien (d)écrites par Ajar, mais encore plus sourire de la tendresse qui se dessine page après page dans un univers si grossier et si humainement drôle.  

 

Plongé dans le monde de la prostitution qui est celui du sexe sans l’amour, Momo pose, se pose et nous pose à nous aussi cette question essentielle : « Est-ce qu’on peut vivre sans amour ? ». C’est la question centrale du livre, l’unique question en réalité tant elle est vitale. Et il vit pour y répondre.

 

Momo, il aime la vie, puis il aime Madame Rosa, de tout son petit cœur. Et Madame Rosa, elle, elle le protège, elle l’aime, même quand ses mandats n’arrivent pas. C’est l’amitié entre un jeune Musulman et une vieille Juive, l’amour impensable et incroyable, maternel et filial, qui fleurit à travers tous les travestissements et toutes les pauvretés de l’humanité. C’est l’Amour qui, seul, résiste jusqu’à la fin et est « capable de tout, croit tout, endure tout »[3].

 

A la fin si rocambolesque succèdent ces derniers mots, sonnant comme une réponse finale, même au sein des dernières notes d’humour : « il faut aimer ».

 

Je ne sais pas si c’est parce que je l’ai lu sur le Camino et qu’il reposait à côté de ma Bible mais j’avais en écho du St Jean : « Mes enfants, nous devons aimer, non pas avec des paroles et des discours, mais par des actes et en vérité. » Bizarre, non ? 

 



[1] Faites pas genre, je vous ai vus le lever votre sourcil !

[2] Je cite, hein…

[3] Alors là, je cite aussi, mais, ô indice, c’est un autre Livre. 

mardi, septembre 13 2011

Vatican vertigo

  Habemus papam ! Je ne me prends pas pour le cardinal protodiacre mais je parle bien évidemment du récent film de Nanni Moretti.

 « Brillant, peut-être mais peu priant » ; « beau film et drôle en plus malgré ses longueurs » : je souscris complètement aux analyses de Mgr Bernard Podvin d’une part (à lire ici)  et du P. Emmanuel Pic d’autre part (à lire par là).

 J’ai admiré, j’ai souri, j’ai ri tout en trouvant les traits parfois un peu forcés et l’absence de prière beaucoup trop flagrante : manque de réalisme certain. (Bon, avouons-le, je suis ceci étant complètement fan du match de volley cardinalice !)

 

Habemus papam : je n’aime pas non plus que le film se termine par le retrait du pape, par le début d’une vacance puis ce titre apparaissant immédiatement sur l’écran, suggérant que le seul pape possible, le seul pape régnant déjà dans un monde empli de vacuité et de psittacisme théâtral, c’est le vide…

 

Et pourtant, pourtant, j’ai été touchée par ce pape qui ne veut pas l’être incarné à l’écran par un immense Michel Piccoli.

 Parce qu’au-delà de ce monde moderne qui évacue la question de Dieu, au-delà de ce Dieu qui semble si absent ici, c’est un homme qui est présent et il a toute son importance, y compris pour nous, croyants, qui visionnons ce film.

 Le cardinal Melville, c’est un homme qui reçoit, comme chacun d’entre nous, une mission, une vocation… Charge immense : les autres cardinaux n’aimeraient pas être à sa place et cela se comprend !

 

Mais il n’y a pas que la charge pontificale qui peut sembler écrasante : chacun d’entre nous, pour accueillir une mission, pouvons nous sentir comme ce pape, d’abord écrasé, puis fuyant ce qui est demandé.


Oubliant que ce qui est demandé est aussi donné…

 « Da quod jubes ; jube quod vis :

Donne ce que Tu commandes ; commande ce que Tu veux. » (Saint Augustin)

Cela est suggéré dans le film mais comme noyé par le frou-frou des cappa magna se frottant aux envolées lyriques du psychanalyste ayant un grain alors qu’il s’agit de l’essentiel.

 

On dit que le pape a une salle des pleurs à côté de la chapelle Sixtine quand il accepte sa charge… Cela a dû arriver à plusieurs cardinaux de pleurer en s’habillant pour la première fois tout de blanc mais ils ont prié, ils ont dit oui et ont alors avancé, confiants, pour répondre à l’appel qui leur était lancé. Parce qu’ils savaient que ce n’était pas sur leurs propres forces qu’ils allaient devoir et pouvoir s’appuyer.

 

Finalement, en forçant trop les traits d’un monde d’où la Transcendance semble en exil  – et a fortiori, ce Quelqu’un en qui nous croyons – le film de Nanni Moretti a, au-delà du réel plaisir esthétique qu’il nous offre, le mérite de nous renvoyer, chacun, à notre condition de pécheurs indignes et incapables, certes, mais pécheurs pardonnés et rendus capables de tout en Celui qui nous appelle. 

 

mercredi, août 31 2011

Vitamine pour septembre, et pour la suite !


Parce que ça fait du bien de le relire…

Mais surtout ça fait du bien de le redire, de le revivre, d’en vivre et revivre tous les jours ! 


 

« Et c’est alors que j’ai entendu : « Je t’aime ». Ca alors ! J’te jure que j’ai failli tomber en pâmoison ! Ce Je t’aime, je ne l’ai pas entendu dans le creux de l’oreille, c’était beaucoup plus fort que ça : je l’ai entendu par l’esprit, par le cœur. Une tendresse infinie qui serait montée comme une mer intérieure pour t’immerger. Et j’ai compris que c’était Dieu qui m’avait submergée et subjuguée. Là, tu ressens un sentiment océanique, et tu ressors en île, tout éclaboussé de bonheur. Alors a commencé entre lui et moi une grande histoire d’amour.

 

Depuis que je connais Dieu, j’ai beaucoup changé. Oh ! de l’extérieur, je n’ai pris que quelques centimètres, mais j’ai peuplé mon royaume intérieur de plusieurs milliers de sujets d’intérêt, et je suis bien décidée à ne pas en rester là ! Voilà, voilà : avant, je n’étais qu’un petit bout de femme de rien du tout ; maintenant, je suis une créature unique, parmi des milliers de milliers. C’est une sacrée métamorphose qui est à la portée de tout le monde, à une condition : aimer et se sentir aimé. Pour de vrai, et pour toujours. »

 

Tiré, bien sûr, de Jade et les sacrés mystères de la vie de François Garagnon.

 

samedi, juillet 23 2011

Lectures d'été : Murakami


Temps des vacances, temps où le temps se fait plus lent, comme fait exprès pour y placer des lectures de toutes sortes. Le temps – météorologique cette fois – se met aussi de la partie tant les intempéries nous poussent à rester dans nos demeures estivales, au chaud, à regarder la pluie tomber tout en dégustant thé, café, chocolat chaud et digestifs : autre manière d’habiter le temps, plus doucement, plus lentement.

 

Je ne vous ferai pas l’ennuyeux affront de vous parler de toutes mes lectures d’été mais j’en choisirai certaines pour figurer ici : pas toutes cathos, pas toutes agrégatives (euh, en fait, non, je crois même qu’il y aura un tabou pudique sur ces dernières).

 

Des livres piochés au hasard des titres non-lus, juste pour partager plus souvent qu’à l’ordinaire quelques plaisirs de lecture – ou, à défaut, quelques éventuelles critiques négatives – parce que tout s’y prête.

 

Ces prolégomènes étant posés, ma 1ère découverte de cet été fut asiatique et plus spécifiquement japonaise.

 

Un nom : Haruki Murakami.

Deux titres : Kafka sur le rivage, offert par une amie en septembre dernier et La Course au mouton sauvage, acheté parce que j’avais énormément apprécié le précédent !

 

Des livres… barrés. Enfin, quand j’écris barrés, je pense « fous » mais non pas dans le sens de « n’importe quoi ».

 

Si l’on s’amusait à raconter l’intrigue de ces livres – et encore, est-ce vraiment possible ? – on serait abasourdi par l’apparente absurdité, sans queue ni tête, de celles-ci. C’est que Murakami sait entremêler banale réalité quotidienne et idées folles : on se laisse prendre après un début plutôt ardu à suivre – mais qu’est-ce qu’il nous raconte donc ? Il est fou cet auteur ! – et l’on tourne les pages, de plus en plus vite… Vers la fin des quêtes de ces deux ouvrages : des fins surprenantes, plutôt déceptives, qui nous laissent même assez sur notre faim. Avec en bouche toutefois, une saveur vraiment nouvelle.

 

Ce qui se dégage des livres de Murakami, de sa prose, c’est en réalité une tendre poésie… Un regard fort désenchanté sur le monde et pourtant porteur d’une élévation, d’une indicible beauté. Une beauté qui n’exclut pas l’humour. Oh, pas un humour pour rire à gorge déployée mais pareillement, un humour à dessiner sur nos visages de lecteurs un sourire légèrement désabusé et tendre, humain.

 

J’ai tout simplement beaucoup aimé, surtout Kafka, (… et je crois que l’été ne se terminera pas sans que j’en lise un 3ème !)

       

lundi, mai 30 2011

L'homme libre prie

  

Je ne sais pas pour vous mais, pour ma part, l’interprétation de frère Luc par Michael Lonsdale dans Des hommes et des dieux m’a profondément touchée : parce qu’elle faisait vraie et sonnait particulièrement juste. Il y avait de l’épaisseur humaine et une réelle profondeur spirituelle à l’intérieur de celle-ci : une p/Présence qui rayonnait, même à l’écran.

 

De fait, Michael Lonsdale est un acteur chrétien et pas seulement de nom : c’est un priant. Ce qui lui donne l’occasion de ce petit livre d’entretiens, sobrement intitulé Prière.

 

Dedans, rien de grandiloquent – les questions de celui qui mène l’entretien sont d’ailleurs parfois passablement agaçantes -, rien de particulièrement neuf non plus mais, comme à chaque fois que quelqu’un ose entrouvrir en vérité son jardin intime personnel qu’est la prière, j’admire l’audace !

 

Il ne s’agit pas d’y trouver un exemple - d’ailleurs l’acteur est loin de s’y montrer comme tel et heureusement, ce serait détestable ! - mais plutôt des bribes d’une vie de foi voisine de la nôtre qui peuvent nous questionner, des citations, des prières à nous approprier pour avancer un peu plus sur ce chemin simple et ardu à la fois qu’est la prière.

 

Ce n’est pas un grand livre modèle donc, l’auteur est même souvent critique face à telle ou telle forme de prière qu’il n’aime pas, mais il s’y trouve quelques fulgurances magnifiques, qui font mouche : « En amour il n’y a pas de hiérarchie, il y a des capacités plus ou moins grandes de vivre et d’aimer » ou encore « La prière, c’est la liberté ! »

 

Alors, il n’y a pas à chercher à entrer dans une quelconque « démarche » parce que l’auteur a tout pigé et qu’il est bon de s’entendre dire tout simplement à propos de la prière que « ce n’est pas une démarche, c’est un état d’être ! »

samedi, mars 5 2011

Des hommes et des dieux - reloaded

Certes, tu ne crois pas et tu me dis souvent que, toi et moi, on ne partage rien.

 

J’ai alors voulu te partager un film qui était venu me remuer jusque dans mes profondeurs il y a quelques mois : un vrai beau film qui parlait d’humains, d’hommes tellement humains qu’ils avaient essayé, avec la grâce de Dieu, d’aller jusqu’au bout de leur humanité.

 

2h plus tard, quelques hymnes, une tragédie pourtant si pudique après, le silence se fait.

 

- Que veux-tu que j’en dise ? Je ne vais plus pouvoir dormir.

- Je ne comprends pas : la violence n’est pas montrée ici ? Et si peu de sang ? C’est une histoire d’hommes…  

- Oui, mais c’est une histoire vraie.

- Faut-il se voiler la face et ne pas voir ce qui est ?

 

Le silence dure… l’une comme l’autre vaque de son côté.

 

- Pour moi, leur vie, elle est ratée. Ils auraient mieux fait de rentrer en France.

 

C’est ton choix, ta vision des choses et je n’ai pas à la trouver mauvaise. Et je ne t’ai d’ailleurs répondu qu’en te parlant de ce film qui peut être, je le crois, ferment de paix parce qu’il n’est ni dans le voyeurisme ni dans l’accusation

 

Mais la croyante que je suis fulminait en son intérieur, de tristesse… Leur vie, ratée ? Est-ce uniquement chrétien de croire qu’une vie ne se réussit qu’en se donnant ?

 

J’ai encore une fois été touchée par cette discussion entre frère Christian et frère Christophe, en pleine lutte : « mais ta vie, tu l’as déjà donnée ! ». Tout est là, il n’y a pas d’autre secret.

 

La question est existentielle : Il s’agit de vivre, non de vivoter ; il s’agit de vivre, non de mourir ; il s’agit d’aimer.

 

Donner, se donner : je n’ai que vingt-cinq jeunes années vécues dans un milieu somme toute assez protégé et je ne sais pas, je ne peux pas savoir ce que j’aurais fait à leur place.

 

Mais, quelle que soit ma vie future, j’espère avoir le cran, à leur image, de faire mes choix enracinée dans le Christ, même si je n’y vois pas d’apparente utilité.

 

Parce que je crois que c’est seulement dans une vie donnée, pleinement donnée, que l’on trouve toute sa fécondité et toute sa beauté.

 

dimanche, février 20 2011

Qui a envie d’être aimé ?


 

Une dissertation de 7h vidant suffisamment le crâne pour savoir qu’il sera impossible de faire autre chose de sa soirée, mes pas me guidèrent hier au soir dans un cinéma parisien.

 

Ce film, j’avais prévu d’aller le voir parce que tous les « réseaux » catho en parlaient. Je n’ai pas lu le livre de Thierry Bizot, Catholique anonyme mais il m’est déjà arrivé d’aller lire son blogue (c’est par ici. Ah ben, en plus, il cite du Madeleine Delbrel !) : j’y suis allée sans a priori avec toutefois en tête le très beau dernier billet de Polydamas écrit suite au film.

 

Je souscris assez à son point de vue que le film toucherait peut-être plus facilement les non-croyants que les croyants… mais viendront-ils voir ce film catholique et de surcroît si ordinaire ?

 

Ordinaire, oui. Car ce film n’a rien d’extraordinaire parce qu’il vient révéler, simplement, l’irruption de Dieu dans une vie, par petites touches dans le cas du héros. Oh, rien d’une transcendance massive qui vient vous assommer, mais tout, au contraire, une douceur paternelle, venant rencontrer l’être humain là où il en est dans sa propre recherche. Et, quand la grâce s’insinue en vous, que cela soit ainsi ou brusquement, tout bascule : un peu, beaucoup, passionnément, à la folie même…  et c’est justement là que réside l’extraordinaire ici.

 

Extraordinaire d’un amour fou.

 

Extraordinaire d’un homme qui prend conscience qu’il est aimé et qui, orateur éprouvé, n’en sait plus que balbutier, ému, renversé devant un mystère d’amour qui le prend au plus profond de lui et lui révèle tant sa fragilité que son humanité.

 

J’ai tout particulièrement apprécié les deux scènes de la chapelle, où le héros entrouvre la porte et se retrouve en face d’une statue du Christ qui le regarde.

 

J’ai aimé cette scène parce qu’elle redit l’Essentiel, à chacun d’entre nous :

 

Dieu est là, il te suffit de pousser la porte pour l’accueillir.

Il t’aime, Il t’attend, quand tu veux.

Chaque jour, si tu le veux. 


dimanche, février 6 2011

Autour du discours d'un roi

 

         Quand j’étais plus jeune, j’aimais les héros, les vrais, ceux à beaux pectoraux : je dévorais les légendes antiques, les récits héroïques des grands hommes réels ou imaginaires. Modèles de vertu et de courage, je m’inventais et rejouais leurs vies dans mes jeux pleins de combats et de péripéties aussi folles que vaillantes.

 

           Georges VI, roi d’Angleterre, n’est pas de ceux-là : c’est un cadet, bègue qui plus est, même pas « programmé » pour être roi. Un type ordinaire, respectueux de l’Etiquette de la cour d’Angleterre mais sachant s’en affranchir avec cette facilité que donne la vraie noblesse d’âme. Proche des siens, aimant, tout en étant terriblement colérique et nerveux : un prince, oui, mais avant tout un homme que la nature a doté d’un terrible problème, rendant si ridicule chacune de ses apparitions en public : le bégaiement.

 

          Le Discours d’un roi, ce n’est pas une épopée… mais ce n’en est pas moins un récit héroïque. Mais un récit d’un ces héros qui au fil des ans sont devenus mes vrais héros : ces héros ordinaires, dont les actes héroïques se placent dans un quotidien semblant insurmontable qu’ils ont su pourtant, pas à pas, affronter de leur mieux et épouser jusque dans leurs failles.

 

           Et homme s’assumant pleinement, et homme osant se dresser pour lutter, Georges VI devint Roi plus par un discours que par un couronnement. Force, grande et admirable force que la sienne…

 

J’ai curieusement pensé à ces mots du bienheureux Newman en voyant ce film et en priant le soir ensuite : « Je ne demande pas à voir déjà ce qu’on voit là-bas : un seul pas à la fois, c’est bien assez pour moi. » 


Chrétienne, c’est ma confiance en la grâce qui seule peut me donner cette force et cette humanité dans les luttes de ma vie. Alors, Seigneur, Donne-moi la force d’accomplir juste ce petit pas à la foi(s), c’est bien assez pour moi.

 

mercredi, janvier 26 2011

Monsieur Vincent - La vie à sauver

 

Des vies de saints en bande dessinée, il y en a tant…

 

Déjà, enfant, je dévorais celles de Grain de soleil et je crois que c’est de là que j’ai encore bien souvent telle ou telle image me venant en tête à l’évocation d’un personnage « porté sur les autels » ; et que j’en souris aux anges, à la grande surprise des gens alentour.

 

C’est dire si j’ai été surprise de découvrir que c’était une hagiographie en b.d., Monsieur Vincent, la Vie à sauver, qui avait obtenu le prix international de la BD chrétienne cette année : je n’imaginais pas qu’un genre apparemment si éculé pût obtenir un prix qui avait déjà couronné une œuvre aussi peu classique que peut l’être Le Voyage des pères (qui obtient d’ailleurs un prix spécial pour les 25 ans de la BD chrétienne).


Lire la suite...

mercredi, décembre 22 2010

C’est évident mais pas tant…

 

Quand un livre commence par « contre », j’ai tendance à me méfier, à me demander quel manifeste étrange l’on me proposera encore pour démolir ce qui semblait tenir debout jusque là : comme s’il était honteux d’oser affirmer un jour que l’on est « pour » ! Pourtant, ce livre-là, je tenais à le lire tant j’avais apprécié l’auteur d’une parole osant la différence et dont le ton sonnait si juste dans Le Corps bouleversé, sur un tout autre sujet, pas vraiment évident pour le coup. Alors, j’ai ouvert Contre le Dieu des évidences.

Lire la suite...

mardi, septembre 21 2010

Juste quelques hommes


Enfin, non plus en marge mais en polyphonie, les sacristains vous livrent quelques regards sur le film : 

"Des hommes et des yeux" 

... mais le mieux reste quand même d'aller le voir ! 

mercredi, septembre 15 2010

En marge mais pas tant : des hommes et des mots

    A Midelt, au Maroc, se trouve le monastère N.-D. de l'Atlas, continuation d'un autre N.-D. de l'Atlas, plus célèbre : celui de Tibhirine. Là se sont retrouvés, avec d'autres frères, les deux survivants fr. Amédée (décédé d'ailleurs quand j'étais là-bas) et fr. Jean-Pierre (qui y est toujours) pour poursuivre leur présence en terre d'Islam. Il s'y trouve aussi un oratoire à la mémoire des 7 frères assassinés, orné de leurs portraits. 

   Lors d'un volontariat sur place en juillet 2008, nous travaillions avec des musulmans et, tous les deux-trois jours, nous nous retrouvions pour échanger sur des thèmes, liés à notre pays, notre culture ou notre religion. J'avais pris en charge la préparation de l'échange sur la prière et, du coup, avant et pendant le séjour, c'est dans les textes de fr. Christian de Chergé que je me suis plongée. Leur lecture a finalement accompagné mon volontariat, et même plus, au-delà. 

    C'est pourquoi, quelques jours après la sortie du film "Des hommes et des dieux", j'ouvre mon carnet personnel au mois de juillet 2008 et retranscris ici, comme en marge, les propos (an)notés d'un qui voulait être un frère. 


« La rencontre est un regard vers le paysage de l’autre »

 

------------------------------

 

« Plus immense est l’espérance, plus grande est l’échelle, mieux elle sait d’instinct qu’elle ne saurait s’accomplir qu’en s’investissant résolument dans une longue patience. C’est au jour le jour qu’elle aura à se vivre, à s’entretenir. Tous les petits gestes lui sont bons pour se dire. Un verre d’eau offert ou reçu, un morceau de pain partagé, un coup de main donné, parlent plus juste qu’un manuel de théologie sur ce qu’il est possible d’être ensemble. (…)

 

Aller vers l’autre et aller vers Dieu, c’est tout un, et je ne peux m’en passer. Il y faut la même gratuité. (…)

 

Nous ne voulons pas nous engager avec vous dans une discussion dogmatique. Nous nous sentons appelés à l’unité. Dans le dogme ou la théologie, il y a beaucoup de barrières qui sont le fait des hommes. Nous souhaitons ici laisser à Dieu la possibilité de créer entre nous quelque chose de nouveau. Or cela ne peut se faire que dans la prière.

 

<citant Mgr Tudtud> “La présence chrétienne ne peut être celle d’un observateur réformateur, donateur ou bienfaiteur. Ce n’est pas une présence entourée d’une aura de supériorité ou d’expérience. C’est une présence de totale solidarité et d’authentique sympathie avec les musulmans, sur un plan d’égalité. Et tous ceux qui viennent pour vivre parmi eux doivent « retirer leurs chaussures » comme Moïse, car la terre qu’ils vont fouler est sacrée : Dieu est déjà présent avant qu’eux n’arrivent” »

 

----------------------

 

« Entre l’avoir et le pouvoir, la foi nous dit, ici et là, qu’il y a place pour un “tiers-monde” inédit ; celui de l’ESPERANCE. »

Fr. Christian de Chergé


mardi, août 3 2010

Le Voyage des Pères, t. 3

 

                Toutes les bonnes choses ont une fin : celle-ci était annoncée par la parution du troisième et dernier tome du Voyage des pères que j’ai enfin, un bon mois après sa parution, lu.

 

                J’avais apprécié le premier, approche originale d’un événement qui nous est proche, moins aimé le deuxième dont les références m’avaient toutefois amusée… – oui, en fait, il était bien quand même à la réflexion.

 

                Suivre les pères des apôtres, ne faire que suivre par leur incompréhension les événements de la vie publique du Christ. Goûter par un autre regard la folie des actes christiques… et se laisser emporter par eux.

 

Le tome 3 raconte la fin, Jérusalem (… si je t’oublie, Jérusalem !...), la crucifixion et, of course, la résurrection. Certains traitements de ce dernier volume peuvent surprendre, peu en conformité avec ce que nous attendrions en tant que catholiques mais toutefois cela fonctionne et j’ai vraiment apprécié cette fin de la série. D’autant plus qu’ici, la fin a de sérieux goûts de début qui nous concerne tous !

 

jeudi, juin 17 2010

Munch donne de la voix

                Bon, je dois l’avouer, pour moi comme pour la plupart des gens, Munch, c’est Le Cri et puncto basta. Alors, puisque je n’arrivais pas à travailler mon mini-mémoire, prise d’une aussi soudaine qu’irrépressible envie de culture, je suis allée voir l’expo de la Pinacothèque « Munch ou l’anti-cri » (chuuut, on ne crie pas au scandale, on n’a pas dit l’Antéchrist non mais oh !)

 

                Eh bien, en fait… c’est vraiment intéressant ! Des premiers essais très naturalistes à ses recherches chromatiques des dernières années (en exceptant les portraits que je trouve dotés de peu d’intérêt), les peintures prennent en intensité et en dynamisme. Si la douleur et la mélancolie sont souvent au centre des œuvres du peintre, même des scènes d’amour les plus tendres, il les dote d’une profondeur peu commune qui les rend splendides.

 

                Bref, je ne sais pas faire de la critique d’art et je ne m’y connais pas mais je peux juste dire qu’il y a des toiles vraiment belles : à voir.

 

samedi, mai 22 2010

Robin aboie et la caravane passe



Ce qu'il y a de bien dans certains films, c'est qu'ils accumulent tellement les poncifs qu'on ne saurait tout à fait leur en vouloir puisqu'on en rit bien fort.

Quand la légende de Robin des bois est revisitée par Ridley Scott pour transfigurer le personnage en Sauveur des temps modernes, préfigurateur d'une certaine démocratie contre l'obscurantisme d'un roi tyrannique (bouh, qu'il a une belle tête de méchant le roi Jean !), on se dit que l'on a droit à un vaste canular.

Quand les sentences sont autant de phrases éculées par l'usage, quand la musique se fait dramatiquement angoissante pour souligner la moindre émotion, quand le scénario est merveilleusement prévisible...

Eh bien, l'on comprend que les gentils soient gentils, que les méchants soient méchants et qu'on a définitivement raison (malgré Russel Crowe) de penser c'qu'on pense.

mardi, mai 5 2009

Controverses

 
Affiche de l
 

Choc ! Débattons, moussaillons !

En positif, en négatif, en grand format, en format réduit,

Des droits de propriété aux droits d’image,

Du commerce à l’Art,

Rien que de la provoc’ mais que de la belle provoc’.

 

Avec ses pieds, avec ses yeux, on parcourt l’histoire de la photo comme un gamin émerveillé devant les belles images. Interpelés également par ces images qui disent, qui racontent tant et qui se racontent, aussi, en quelques lignes claires : scandales, usages de faux, procès, immoralité ou, a contrario, récompense, chacune a bien sa raison d’être là.  

 

Bien autrement qu’un roman, nous plongeons dans un autre mode de représentation du réel qui, s’il peut parfois nous rendre mal à l’aise, fait toujours mouche par l’élargissement du regard qu’il provoque : puissance des images, quand tu nous tiens !

 

Bref, allez, que dis-je courrez, à la BNF site Richelieu, il y a prolongation jusqu’au 31 mai 2009.

 

mardi, mars 24 2009

Vie du lettré, W. Marx

 
 

Vie du lettré, W. Marx, éd. de Minuit, coll. Paradoxe, 2009, 240 p.  

Après les citations, quelques mots !

« Ils lisent des textes, les rassemblent, les éditent, les commentent, les transmettent aux générations futures, produisent à leur tour d’autres textes : ce sont les lettrés, apparus parmi nous voici déjà quelques millénaires. […] Le plus souvent invisibles ou méconnus, ils composent une communauté secrète, reliée à travers les temps et les lieux par des rites partagés, des habitudes analogues, des affinités mystérieuses. Qui sont-ils ? Comment vivent-ils ? Où habitent-ils ? Que mangent-ils ? A quelles amours s’adonnent-ils ? Comment naissent-ils et meurent-ils ? A toutes ces questions et à bien d’autres, ce livre apporte des réponses précises et concrètes. » (Extrait de la quatrième de couverture)

Un simple moment de connivence que la lecture de ce texte. Oh, ce n’est pas un « grand » livre mais c’est un livre remarquablement bien fait, intelligent et amusant. Divisé en 24 chapitres, autant que d’heures dans une journée, on y suit pas à pas les grandes étapes de la vie d’un « lettré », ses occupations, ses problèmes, ses doutes, ses joies. De la Chine à la France, de la préhistoire à aujourd’hui, l’auteur tente de retrouver les grandes lignes de ce qui  fait l’existence d’un lettré, et l’on est séduit. On s’y reconnaît, parfois, mais surtout l’on s’amuse bien, d’autant plus que ce livre est bien celui d’un lettré : notes et bibliographie y sont abondantes !

            On ne peut être d’accord avec tout, certains chapitres semblent lacunaires (celui sur « l’instruction » par exemple où la figure des Maîtres du Lettré apparaît peu alors même que les « maîtres et les maîtres de ses maîtres » sont les dédicataires de l’ouvrage !), d’autres sont exagérés (cf. celui sur « l’âme » et le passage cité il y a quelques jours sur ce blog qui m’a fait sourire) mais l’ensemble se lit avec plaisir. Pour finir, je ne résiste pas au plaisir d’une dernière citation avec un  court passage tiré du chapitre sur « la sexualité » qui se passe en bibliothèque :

« Non plus que les anges, le lettré n’a de sexe. Ce qui revient à dire qu’il relève de l’un et de l’autre. Toute la communauté des lettrés vit sur ce paradoxe.

Il n’y a guère de lieu plus chaste qu’une bibliothèque. Mais guère de plus torride également lorsque, jour après jour, autour des mêmes tables, les mêmes lecteurs se croisent, s’observent, se frôlent, sans pourtant rien savoir les uns des autres. […] Muette, secrète, l’existence d’un voisin de bibliothèque se limite au grattement d’une plume sur le papier, au cliquetis d’un clavier d’ordinateur, au bruit d’une page tournée, d’un stylo reposé, aux menues manifestations de la vie organique. […] La seule chose à peu près certaine que, sans trop de peine, on puisse savoir de lui, ce sont les livres qu’il consulte. […]. On soupçonne certains lecteurs ou lectrices de ne commander certains ouvrages que pour se donner une pose. Dans une bibliothèque, les signaux sexuels sont si feutrés, si tamisés, si indirects, que tout ce qui, dehors, passerait normalement inaperçu prend aussitôt valeur d’invite agressive. Nul besoin de bas résille, de pantalon moulant, de maquillage excessif : un livre suffit, non nécessairement érotique. L’originalité des lectures est un puissant aiguillon de la libido : rien ne fait plus fantasmer l’exégète de codes juridiques qu’un métaphysicien de haute volée ou qu’une lectrice de poésie de la Renaissance, et vice-versa. »

A noter pour les Parisiens : une rencontre avec William Marx est organisée autour de Vie du lettré le jeudi 2 avril à 18h à la librairie Compagnie.  

 

- page 4 de 7 -